Diagrammes / Sou Fujimoto
JACQUES LUCAN - Précisions sur un état présent de l'architecture
La
définition d'un diagramme appartient aux premières étapes de la conception
d'un projet. Il doit être simple et intelligible. Il en
est généralement attendu une cohérence qui doit rester opérante
dans l'entier du développement du projet.
Un diagramme n'est donc pas un organigramme; il n'a pas pour but
primordial d'organiser des fonctions, même s'il détermine cette organisation.
Un diagramme est la «traduction» d'une idée.
Un
diagramme n'est pas un type. S'il est repris dans un processus
de projet, un type aura tendance à-être un opérateur de fermeture sur ce qui est connu. A cette tendance,
il ne peut échapper qu'en devenant diagramme,
le type alors s'éloignant de lui-même. Car
un diagramme est un opérateur d'ouverture dans la mesure
où il peut donner lieu à une multiplicité d'agencements.
Un
diagramme peut servir à trouver la cohérence d'un dispositif,
c'est-à-dire l'adéquation entre le programme
et la structure qui lui est proposée - comme
ce fut Je cas chez Koolhaas ou Sanaa. La structure se
doit de proposer des alternatives à des dispositifs qui ne répondent plus aux
nécessités du temps présent. Le diagramme peut être alors nommé programmatique
ou structurel.
Un diagramme
peut servir à réguler une suite
d'opérations successives dans la recherche d'une figure
adéquate à un environnement, généralement urbain - comme ce fut le cas
chez Herzog Et de Meuron. Le diagramme peut être alors nommé contextuel.
Un
diagramme peut servir à définir un dispositif dont les
qualités spatiales sont primordiales relativement à un programme
donné – comme ce fut le cas chez Fujimoto. Le
diagramme peut être alors nommé spatial.
Que
les diagrammes soient structurels, ou contextuels, ou spatiaux
n'entraîne pas l'impossibilité de croisements ou de chevauchements
des uns sur les autres: les diagrammes structurels, par exemple, induisent
certaines qualités spatiales, mais sans le recours à des figures; les diagrammes
contextuels peuvent plus aisément se détacher
des questions programmatiques ou même spatiales, mais pas
de la nécessité, pour eux, de mener à la définition de figures. Les distinctions faites ici
mettent l'accent sur les tensions
qui traversent les problématiques diagrammatiques, problématiques que nous verrons
s'ouvrir vers d'autres horizons lorsque
seront mis en jeu les moyens numériques de description et de conception.
Un
diagramme, pour autant, ne peut prétendre donner toutes les qualités
d'un projet, sinon au risque que celui-ci
s'appauvrisse en n'étant que la réalisation d'un
schéma. Pour définir la présence d'un
bâtiment, des paramètres supplémentaires
sont en jeu, notamment constructifs et matériels, qui doivent être
en cohérence ou en adéquation avec les options
diagrammatiques. C'est pourquoi, sous un autre
point de vue, notamment phénoménologique, nous retrouverons plus loin
certaines des réalisations des architectes dont il a
été précédemment question. C'est pourquoi, même s'il
souligne la clarté du diagramme de la House
T, Fujimoto considère qu'elle n'est pas suffisante, et qu'il faut
encore que la réalisation architecturale «ne se résume
pas à un simple diagramme, mais [qu'elle] émerge
comme une sorte
de paysage (landscape) capable de rester en mémoire »
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